Port de la burqa : réfléchir avant de s'indigner

Publié le par pa.legoutiere

Voilà donc que notre gouvernement envisage, par la voix de son porte-parole, d’instaurer une loi sur le port de la burqa. Jusqu’où ira-t-on donc dans le n’importe quoi ? Ce sujet remet en cause à la fois le principe de laïcité et celui du respect de la vie privée.

La laïcité, c’est avant tout l’observation de la tolérance. L’interdiction des signes religieux ostentatoires à l’école a été un grand pas.  J’aurais préféré qu’elle s’étendît aux lieux de travail. En revanche, dès que l’on sort dans la rue, toute liberté vestimentaire respectant la pudeur doit être tolérée. On peut trouver un loubavitch avec ses phylactères ou un prêtre en soutane parfaitement ridicules ou agressivement choquants, sans parler de l’accoutrement du Dalaï-Lama. C’est le droit de chacun d’entre nous. Un consensus national s’est établi en France autour d’une laïcité à deux vitesses, qui tolère toutes les expressions de religions diverses –au premier rang desquels la religion catholique- mais aussi le protestantisme, le bouddhisme et autres superstitions anecdotiques sans qu’on y trouve à redire. Mais dès qu’il s’agit du judaïsme ou de l’islam, attention : on touche à de la dynamite ! Et l’on fait preuve dans un cas d’une bienveillance démesurée et dans l’autre d’une suspicion extrême.

L’émergence de l’affaire du port de la burqa n’est en fait une fois de plus qu’une manifestation du politiquement correct. Ainsi, la suspicion maladive à l’égard de l’Islam ou de tout de ce qui s’y rapproche s’habille d’une pulsion compatissante. On parle ainsi de « l’asservissement » des femmes soumises au port de ce vêtement. On n’évoque pas en revanche le sort de nos religieuses ayant fait vœu de chasteté, voire vœu de silence ? Ne sont-elles « asservies » par leur serment ? Faut-il courir à leur secours par la loi ?

Interrogées aujourd’hui par les radios, les « porteuses de burqa », s’exprimant au demeurant dans un français parfait, expliquaient qu’en cas de contrôle d’identité ou de contraintes liées à leur profession, il allait de soi qu’elles quitteraient leur tenue pour satisfaire à ces obligations. D’ailleurs comment pourrait-il en être autrement. Et imagine-t-on une seule seconde le ridicule de la proposition de monsieur Chatel : qu’en application d’une « loi », un agent de police verbalise une femme ainsi vêtue « vous portez une burqa ? Voilà la contredanse ! » Ou que sur injonction de la force publique, la femme en question se défasse de tout vêtement en pleine rue ?

Voilà du bon sens, même si l’on n’empêchera pas les esprits forts de dénoncer la domination de la femme musulmane par son mari et sa nécessaire absence de libre-arbitre. Ce qui s’appelle considérer ces gens dans leur globalité comme des idiots du village, des brutes épaisses, voire des manipulateurs pervers. Tout en oubliant par ailleurs que l’agressivité sexuelle –et sexiste- à l’égard des femmes d’origine musulmane a pris, notamment dans les grandes villes et les banlieues, des formes d’une extrême violence, comme l’ont prouvé de sinistres faits divers tout au long de ces dernières années. On comprend qu’elles souhaitent s’en protéger.

Enfin, si le port de la burqa peut être considéré comme une preuve d’obscurantisme ou de fanatisme de la part des femmes qui la portent ou des maris qui éventuellement les y contraignent, il n’appartient pas à la société de les en faire sortir par la loi et de les laisser responsables de leurs responsabilités !

Une fois de plus, on veut privilégier l’édiction de la norme à l’exercice de l’esprit critique : si ces femmes, ou leurs maris, lorsqu’elles en ont, sentent une distance s’établir entre eux et leurs voisins, leurs proches, leur quartier, laissons-les en parler avec leur entourage et en tirer les conséquences. D’ailleurs, un grand nombre de musulmans sont les premiers à réprouver le port de ce vêtement et à rappeler qu’il ne relève pas d’une consigne du Coran !

De grâce, à nouveau, que l’on cesse de vouloir gouverner la vie des gens en croyant faire leur bien malgré eux !
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L
Selon Yazid Sabeg, commissaire à l'égalité et à la diversité des chances, dans une interview à La Croix : "le débat sur la burqa pourrait bien être "un nouveau piège tendu à notre pays".<br /> Il va "rouvrir des frustrations, des antagonismes, des racismes alors qu'il faut au contraire rassembler les Français"."On peut penser ce qu'on veut de la burqa, de son caractère régressif ou non, il ne s'agit que d'opinions personnelles...l'Etat n'a pas à se prononcer sur les tenues vestimentaires des Français".
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J
merci pour cet article, la tolérance favorise la régulation des excés alors que l'interdiction fait émerger les comportements extrèmes...il paraît que nous vivons dans une société ou il manque des repères (manque d'éducation pour la jeunesse)encore faudrait'il tolérer les repères de chacun qui ne sont pas forcément les mêmes que le voisin..isa03
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